Simple pleasures

Dereck & Grayson

Grayson avait appris à déambuler dans les rues de New York sans soucis. Cette ville, il se l’était appropriée, il l’avait fait sienne, et il était presque sûr que s’il revenait à San Francisco, il se perdrait au premier coin de rue. Tout le rattachait à New York, hormis ses parents, qu’il visitait encore de temps en temps, surtout en période de fêtes.
Et la période des fêtes, on pouvait dire que chaque habitant de New York avait un pied dedans. Grayson n’avait pas prévu de passer Noël chez ses parents. Ni le réveillon. Il voulait s’amuser. Pas que visiter ses parents l’ennuierait, loin de là, mais… il voulait profiter. Et son restaurant avait besoin de lui. Il ne pouvait pas se permettre de les laisser, tout le monde allait être overbooké.
La veille, il avait envoyé un message à Dereck pour voir si un petit verre au bar The Ides plairait au jeune homme. Depuis son… expérience avec Teddy, il hésitait grandement à solliciter Dereck. Hésiter ne faisait pas partie de ses habitudes, mais il expérimentait encore les relations entre hommes, et il jugeait plutôt normal d’hésiter. Bien que Dereck lui ait souvent fait du rentre-dedans, et ce bien avant qu’il couche avec Teddy. Dans tous les cas, il avait l’intention d’avouer au jeune homme sa toute récente bisexualité. Il espérait également qu’en faisant cela, il l’attirerait dans son lit. Jusqu’ici, il avait toujours été la proie des hommes. Il avait envie de changer de division. Passer prédateur.

Il faisait frais ce soir. Grayson avait passé un manteau par-dessus sa chemise blanche, et une écharpe pourpre lui ceignait le cou. Lorsqu’il arriva au pied de l’immeuble, il regarda autour de lui, et ne voyant nulle trace de Dereck, il décida de monter directement au sixième étage. Il était assez tôt, et il n’eut pas beaucoup d’attente. Presque pas, même. La vue était magnifique, mais il préféra rester à l’intérieur. Originaire de Californie, il était un peu frileux. New York était froide, pour lui. Heureusement ici la pièce était chaude, et des effluves d’alcool montaient de parts et d’autres. Il retirait manteau et écharpe lorsqu’il repéra Dereck, assis dans l’un des luxueux canapés de la pièce, dans un coin, un peu à l’écart. Il le rejoignit en étirant un petit sourire. Tout dans sa démarche était fait pour séduire. « Hey, je t’avais pas vu. Ça va ? » Il se tourna vers une serveuse qui passait par-là et laissa Dereck commander avant lui avant de demander un Bloody Mary. La serveuse sembla le reconnaître car elle lui adressa un grand sourire, sourire que Grayson lui rendit, bien que non habitué à ce genre de chose. Puis, il se tourna une nouvelle fois vers le blond. « Je crois qu’on va éviter de se risquer sur la terrasse, hein. Il fait un froid de canard. » Il espérait bien que Dereck approuverait, il n’avait pas envie de se risquer au froid New-Yorkais. Ou alors, il devrait reprendre sa fidèle écharpe. Or, ici, il était bien.

Simple pleasures

Dereck & Grayson

La remarque de Dereck lui arracha un petit sourire tandis qu'il prenait place dans le canapé, à côté de lui. Il prit le temps de commander sa boisson, puis répliqua en jouant des sourcils : « Me perdre dans New York, moi ? Il faudrait vraiment que je suis devenu aveugle. » Il aurait pu parcourir la ville à pied. Sans blague. Il était à New York depuis qu'il avait dix-sept ans, l'avait parcourue de long en large, du Bronx à Staten Island. En récupérant son verre, le contact de ses doigts contre la surface glacée le fit frissonner, et il put sentir les poils se dresser sur ses bras. Il reposa alors son verre et se mit à se frotter les mains, comme pour se réchauffer, même si dans la pièce, il faisait bon. Il évita aussi de regarder à l'extérieur, le californien frileux qu'il était ne supportant pas le froid. Mais New York était la capitale gastronomique mondiale aux yeux de Grayson. Tous les chefs étoilés s'y succédaient. En France aussi, mais disons que New York était quand même plus près que la France. Grayson avait déjà fait plusieurs séjours en France, en grand amateur de vin qu'il était, et avait rencontré plusieurs personnes renommées dans le monde culinaire. Il aimait la France, mais aimait encore plus New York – sauf sa météo désastreuse. L'Italie aussi était une de ses destinations préférées. La cuisine à l'huile d'olive, un art qu'il commençait à maîtriser à la perfection. Son mentor, un italien, lui avait tout appris de la cuisine italienne avant de mourir et de lui léguer son restaurant. Dans une autre vie, s'il avait eu le choix, il aurait voulut naître à Toscane. Il était véritablement tombé amoureux de cette ville.

Frissonnant à nouveau, Grayson proposa à Dereck qu'ils restent à l'intérieur, et la réponse de ce dernier lui arracha un petit rire. Il posa une main sur sa cuisse et répliqua, sourire aux lèvres : « Peut-être bien. » L'on aurait pu penser qu'il plaisantait, car il retira aussitôt sa main, mais il y avait bien eu une part de sérieux dans les propos de Grayson. Il but une gorgée de son Bloody Mary, et prit une profonde inspiration. Décidément, il n'aurait pas dû. Il crevait de froid. C'était un café qu'il lui aurait fallu, pas un cocktail froid comme la mort. Et maintenant que Dereck avait commencé à le provoquer, il avait envie de lui raconter sa petite expérience avec Teddy. Non, il en mourait d'envie.
C'était aussi une manière de narguer son ami qui lui avait fait des avances depuis tout ce temps, mais qui n'avait jamais réussi à l'attirer dans son lit. Ce que Grayson était extrêmement tenté de faire, en ce moment.
Il déclara alors, tout en buvant une autre gorgée de sa boisson et en frissonnant une nouvelle fois : « Si j'te disais que je me suis retrouvé dans le même lit qu'un mec... ? » Voilà, la bombe était lâchée. Restait la réaction de Dereck, qu'il surveillait du coin de l’œil, une lueur malicieuse au fond des yeux.